Maxime Cazajous est un personnage étonnant dans le milieu du trail, qui ne le connait pas ? La réponse risque de vous étonner, mais beaucoup ne savent pas qui il est. C’est pourtant une machine à dévaler les pentes, un vérin à gravir les sommets. Tout simplement car ce mec est discret et ne s’affiche pas comme une star. Certains ont découvert ce béarnais lors de son étonnante 3ème place sur la diagonale des fous l’année dernière, depuis il sort de l’ombre. Pourtant les sponsors ont bien sentis son potentiel comme Hoka, ce n’est pas pour rien. Afin de mieux vous faire connaitre ce discret champion, nous avons décidé de le traqué dans son tout petit village. Il a gentiment accepté de nous recevoir dans sa maison autour d’un café, pendant sa pause repas. Du coup, perception du GPS pour trouver la bonne direction. Je m’enfonce dans les profondeurs du Béarn, au bout d’une heure de trajet me voilà arrivé, merci la technologie sinon je me serais perdu.
WT : Salut Maxime et merci de m’accueillir dans ta maison pour ce petit portrait, avant tout peux-tu te présenter en quelques phrases ? MC : J’ai 38 ans, je suis technicien territorial en assainissement à la communauté des communes du pays de Nay. Je suis père de 2 enfants Axel 8 ans et Adam 4 ans, marié à Julie, je vie et travaille à Nay dans le Béarn. Etant fils d’agriculteur, je suis mon père sur l’exploitation et je l’aide. Sinon j’adore le bricolage et forcément je fais du trail.
WT : Quand as-tu découvert cette discipline, quand t’y es-tu mis sérieusement ? MC : J’ai commencé assez jeune avec la course de la Corruda à Lestelle Betharram course locale et le raid d’Asson, J’ai pris du plaisir à regarder le marathon des givrés de Nay qui passait devant chez moi. Je jouais au foot et j’adorais courir, j’ai donc fais ma première course à 14 ans avec les 13 km des Givrés. J’ai toujours aimé pratiquer un sport-co avec de la course à pied. Puis en cadet 2ème année je suis parti jouer au rugby, pendant 15 ans.
WT : Un ami commun, Arnaud le traileur fou, m’a dit que tu étais un excellent numéro 9… MC : Excellent je ne sais pas, mais j’étais vaillant, j’adorais courir j’avais la caisse pour bien tenir mon rôle.
WT : il m’a aussi dit, que lors de séances de préparations rugby en course à pied, à la fin il n’y a qu’un seul qui tournait en rond pendant que les autres en était presque à la binouze, toi. MC : ah ah ah et il t’a dit d’autres choses ?
WT : Oui mais ce serait trop déplacé, et le trail dans tout ça? MC : Je le faisais en parallèle du rugby, avec de petites courses à la montagne mais toujours la Corruda que je voulais absolument gagner. D’abord car c’est chez moi, mais également pour rendre hommage à mon grand-père, c’est lui qui m’a donné la passion de la montagne, c’est grâce, ou à cause de lui que je fais du trail. J’ai fait cette course 2 fois, mon grand-père me suivait en me disant que je la gagnerais. L’année où il est décédé je me suis promis de la gagner, pour lui. Du coup, l’été je me suis entrainé comme un fou, la course étant en septembre, j’ai même repoussé le début de ma saison de rugby. Je l’ai gagnée, j’ai fini devant certains coureurs comme Christophe Bassons et Jules Besseyre qui étaient des références à l’époque. Pour gagner le trophée, un bout de bois, il fallait gagner 3 années d’affilées, donc rebelote l’année suivante et celle d’après, je me suis entrainé comme un âne. J’ai donc eu ce fameux trophée, pour mon grand-père en 2008 pour la 3 ème fois, tout en continuant le rugby.
WT : Et donc après les grands débuts avec seulement du trail ? MC : Non, car je voulais effectivement arrêter le rugby en 2009 mais j’ai fait 1 an de plus pour jouer avec un copain à qui j’avais promis. Fin 2010 mon fils est né, j’ai arrêté le sport, une année sabbatique car je me suis construit ma maison : dalle, mur, charpente, carrelage… bref entre le boulot, la maison et la famille pas de temps pour le sport.
WT : Tu me disais que tu aimais le bricolage, mais construire soit même sa maison ce n’est plus du bricolage ! MC : oui peut être pas.
WT : Pardon je t’ai coupé, quand as-tu repris ? MC : Donc en 2011, 31 ans je me suis mis sérieusement au trail, et seulement au trail avec la course des templiers, où j’ai fini 13 ème ou 14ème , avec mon maillot de club, tout seul sans entraineur, ni partenaire. Suite à ça j’ai rencontré mon futur entraineur, Nicolas Boyer, à un mariage. On a parlé de mon entrainement, il a halluciné de voir que je courrais sans cardio, que ne savais pas ce que c’était la VC max, la VMA. Il m’a demandé mon programme d’entrainement, que je n’avais pas puisque je prenais ça sur des magazines. De fil en aiguille même s’il ne voulait plus entrainer, il m’a fait faire des tests 15 jours après, puis des programmes d’entrainement pour préparer Gruisans, mais c’était juste pour cette course. J’étais très content j’ai fini 5 ème donc je l’ai appelé, du coup il m’a encore entrainé pour les citadelles et finalement toute une saison juste par gentillesse. Il est devenu un ami. Puis avec toutes les sollicitations qu’il a eu derrière il s’est remis à entrainer un petit groupe de 10 personnes gratuitement, puis bien sûr a demandé une participation derrière, normal il y passe du temps. Du coup depuis 2012 c’est lui qui m’entraine, et qui m’a permis de progresser et d’exploiter mon potentiel. Au début sur des formats cours et depuis 2015 je fais plutôt des ultras.
WT : Au niveau de ton entrainement, à quelle fréquence cours-tu ? MC : En hivers c’est 10 à 12 heures par semaine et en été cela peut monter jusqu’à 25 heures. Je m’entraine 6 jours sur 7, je me laisse toujours un jour de repos le mardi en général. Le lundi renforcement et footing de 1 heure, le mercredi c’est sortie longue en trail ou vélo, le jeudi plutôt fractionné, le vendredi sortie longue aussi, le samedi fractionné et le dimanche sortie longue.
WT : Quand on regarde ton palmarès, tu es tout simplement énorme, tu finis la saison 2018 : que des premières places sauf sur 2 courses. Laquelle de cette année tu retiens en particulier ? MC : Sans hésiter la diagonale des fous avec la 3ème place, c’est vraiment mon plus beau résultat. Je fais 27h30 à ma première édition il y a 4 ans et là je fais 3h de moins. C’est une belle revanche sur les autres années. En 2017 je me blesse car je pars trop vite. Je ne suis pas gestionnaire, je cours à l’instinct, j’aime être devant, ne pas attendre que les autres explosent, je ne calcule pas.
WT : J’ai regardé le reportage sur intérieur sport, extra, quand on te voit en baver sur Mafate, tu gardes la banane, tu es toujours souriant. On voit que tu t’éclates même si tu es dans le dur. MC : En plus j’avais ma famille en haut, c’est un moment fort pour moi, c’est eux qui me poussent, ils sont important. Ce n’est que du sport, tu as beaucoup de monde qui t’encourage, il faut savoir leur rendre à ta manière. Même les journalistes, à la Réunion : tu es assailli et malgré la fatigue, il faut répondre et sourire, mais je ne me force pas, ils ne sont pas là pour t’embêter, au contraire même. Avoir le sourire c’est un plaisir, je m’éclate. On est tous là pour une même passion et pas pour se tirer dans les pattes. Là où je souris moins c’est à l’entrainement, et après en course ça passe.
WT : 2019 tu repars sur la diagonale ? Tu vises forcément mieux ? MC : Je pense déjà que je peux gagner du temps, après pour le reste cela dépendra de la concurrence aussi. La victoire j’y pense forcément, si je peux, mais même si je ne la gagne jamais ce ne sera pas un regret. Je n’aurais jamais aspiré à ce niveau en commençant la course à pied, je suis heureux de là ou j’en suis. Si je ne fais plus rien comme résultat maintenant, je ne regretterais rien. C’est du sport, un plaisir, une passion.
WT : Des victoires tu en a un sacré paquet, et même des courses seulement connues dans le sud-ouest. Tu as gagné l’année derrière le BK85, en mettant 1h au 2ème , 6 jours après la victoire sur le GTVO. MC : Oui mais ça dans les Alpes ça ne parle pas. Il m’est arrivé de battre des records sur des marathons, personne n’en parle car ce sont des courses médiatisées localement et pourtant énormément exigeantes pour certaines. Beaucoup de coureurs ajoutent des courses à leurs palmarès mais qui passent inaperçues, et pourtant superbes. Si tu ne cours pas dans les Alpes on ne te connaît pas. Lors de ma dernière interview dans esprit trail, c’est ce qu’il m’a dit, qu’on ne me connaissait pas plus que ça, pourquoi tu ne fais pas plus de courses ? Après, je ne cherche pas non plus à être mis en lumière, j’en fais 10 à 12 grosses par an. Il m’a « reproché » de ne pas faire de courses internationales. J’ai une vie de famille, j’ai un boulot je ne peux pas partir comme ça. J’adore courir dans les Pyrénées mais je vais aussi dans les îles, ma femme n’est pas fan de montagnes donc je joins l’utile à l’agréable en y partant en vacances en famille. Je fais la Réunion, la Corse, Madère, les Canaris, en Guadeloupe, chaque fois des destinations sympas pour la famille, c’est une priorité pour moi.
WT : En course, tu es plutôt produit fait maison ou tout préparé ? MC : J’ai un partenaire nutrition qui est Nutrisens qui me fournissent les boissons énergétiques, gels, barres. Sur du court je prends ça mais sur du long je ne vais pas me fabriquer mes produits non plus, j’y vais aussi à l’envie donc c’est des pommes de terre avec du gros sels dedans, des bananes, des petits sandwich pain, fromage, jambon. Bref mélange de salée, sucré car sur du court les gels et barres cela va un moment mais sur les longs il faut varier les plaisirs, ce qui te fait envie.
WT : Tu fais attention à ce que tu manges la semaine ? Car quand je vois ce que se met Benoit Cori et comment s’est passée l’ITW… MC : Hou là non pas comme Benoit, j’aime bien une bière, un peu de vin, faire la fête mais raisonnablement, je ne suis pas aussi joueur… Par contre j’adore manger, tu vois à midi j’ai mangé du pâté, de la purée, des pieds de cochons et du fromage. Chez moi on fait le cochon, le canard tous les ans, je ne fais aucun régime particulier, au contraire c’est déjà dur de s’entrainer donc je prends du plaisir en me pausant avec un bon repas. En gros j’aime bien faire du sport pour bien bouffer derrière, je suis du terroir j’ai ça dans le sang. Je ne prends jamais de complément alimentaire, et cela marche j’ai rarement des coups de mou en course. Après peut-être qu’en faisant attention à certains repas je serais plus performant, je dis bien peut-être, le trail doit rester un plaisir comme la bouffe, sinon il faut arrêter.
WT : Cela date de janvier, mais revenons sur ta consécration en finissant, suite à des votes, premier aux trails awards 2018 devant ceux qui étaient devant toi à la diagonale, chapeau. MC : Oui mais cela reste du côté du public, cela ne représente pas mon niveau je suis inférieur à Fancois Dhaene et Xavier Tevenard, c’est seulement à l’appréciation des gens, je suis peut être apprécié en tant qu’homme. Je suis seulement connu dans le sud-ouest, merci à eux ils se sont mobilisés pour moi et Joceline, c’est les béarnais qui nous ont permis d’y arriver.
WT : Normal c’est ce que je te disais au début, quand tu passes sur un trail les gens parlent de toi comme quelqu’un d’attachant, de souriant, de simple, sympa, ultra abordable, dans le trail les gens aiment ça. MC : Merci, je fais juste ressortir mon plaisir pour ce sport.
Si tu étais un animal : un Izard, c’est les Pyrénées, le Béarn un animal qui aime la caillasse Si tu étais une couleur : le blanc sur les courses c’est une couleur qui me motive, elle me rappelle des bons souvenirs quand j’ai du mal. Si tu étais une chanson : Adishats une chanson d’un groupe Béarnais Si tu étais un trail : la Corruda, la Réunion ça fait rêver mais gagné la Corrude par 3 fois c’est de l’affectif qui te prends aux tripes, le début d’un commencement pour moi Si tu étais un métier : Agriculteur Si tu étais un objet : une paire de chaussure Si tu étais un fruit : une banane Si tu étais un sport : le trail bien sûr
Effectivement Max est un coureur hors pair, mais aussi trop méconnu. Dans le sud-ouest il a une belle réputation, il a gagné des courses extrêmement exigeantes et difficiles. Pour ceux qui connaissent le BK85, le GTVO, l’Euskal trails et bien d’autres. Vous ne trouverez jamais son palmarès exacte sur internet tant les courses pyrénéennes ne comptent pas au regard des Alpes. Mais le sud-ouest reste une identité forte dont on est fier. Max sait que les courses qu’il a gagné dans son sud-ouest, sont aussi importantes et difficile que des connues et reconnue. Vous en savez maintenant un peu plus sur ce traileur, mais il y a aussi ce qui n’est pas écrit, ce serait trop long de décrire ce bonhomme. Pour ma part ce fut une superbe rencontre, Max est quelqu’un d’entier vraiment à part d’une simplicité remarquable. Jamais il ne se vente, ne se met en avant, au contraire même, derrière sa timidité se cache un mec extra. A force d’écrire des articles on rencontre du monde, je pense que cette belle rencontre restera à part des autres. Pour ceux qui n’ont pas encore découvert Max et sa région, au pied des montagnes, je vous invite à passer dans son gite : la Caza Beroi. Un gite entièrement fait de ses mains avec tout le confort, je dirais même sur équipé pour les sportifs en quête de sensations fortes dans la région. Ou tout simplement pour passer, un week-end ou des vacances reposantes en famille ou entre potes. Bref vous allez tomber sous le charme de cette magnifique bâtisse, n’hésitez pas à aller jeter sur œil sur facebook, ça vaut le coup.
Je finirais en remerciant, comme à chaque article, Pierre Ezcurra qui est le photographe qui me permet de mettre de belles photos. Celui-ci n’échappera pas à la règle, puisque toutes les photos ont été prise par lui. Il m’a d’ailleurs également dit qu’il avait énormément apprécié la rencontre avec Max. Milesker Pierre. Finalement Max est apprécié de tous, partout où il passe il laisse son empreinte soit par sa gentillesse soit sur les podiums en écrasant la concurrence. Mais comme tout être humain il a des défauts, le sien c’est qu’il est béarnais… Merci à toi pour ce moment.
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